
Vous êtes-vous déjà demandé si votre vie avait un sens ? Une quelconque valeur ?
Quelle est la valeur de la vie ? Pourquoi suis-je ici ? Y a-t-il un but à toutes ces choses et s’il y en a un, quel est-il ? Et s’il n’y en a pas, que faisons-nous ici ?
Avez-vous déjà cherché désespérément un sens à toutes ces choses terribles, tel que les génocides , les guerres, les famines, toutes ces personnes qui vivent dans la misère et la pauvreté. En y réfléchissant, pensez-vous que la vie humaine soit une chose précieuse ? Pensez-vous qu’il soit vraiment nécessaire d’accorder autant d’importance à sa propre existence ?
Si vous voulez aller plus loin dans cette réflexion, posez-vous ces questions pour toutes les formes de vie – réfléchissez aux millions, aux milliards d’êtres vivants – tous les poissons dans l’eau, les insectes dans les airs, ceux qui rampent sous terre et à sa surface – cette quantité innombrable d’êtres qui, chaque jour, naissent et meurent, naissent et meurent, deviennent malades, deviennent vieux, se font tuer, se font manger puis se font remplacer.
Tous ces êtres veulent vivre, comme vous. Tous ces êtres aiment la vie (sont attachés à leur propre existence), comme vous. Et tous ces êtres ont peur de la mort, comme vous (si vous en doutez, regardez dans les yeux un poisson échoué sur la plage, regardez l’araignée qui essaye de s’enfuir au moment où vous mettez le pied dans la baignoire).
Tous ces êtres ressentent la faim, le froid, la soif, la douleur, la peur, tous souffrent et tous, sans exception, meurent.
Prenez n’importe quelle vie parmi la source intarissable d’êtres vivants sur terre, n’importe laquelle de cette vie qui va s’élever puis disparaître dans le néant, quelle valeur a-t-elle ? Quel est le sens de tout ça ? Est-ce que la vie de cette fourmi sur laquelle vous avez marché hier a un sens ? Si oui, lequel ? Quelle valeur avait son existence ?
Bien que nous voudrions qu’il y ait un sens à la vie, au regard de ces constatations il devient difficile d’en trouver un.
Alors, pourquoi lorsque quelqu’un vous pose cette question « est-ce que TA vie a de la valeur ? » sans hésitation vous allez répondre, « oui absolument, ma vie vaut la peine d’être vécue ».
Donc… Qu’est-ce qui vous rend tellement spécial ? Quelle est la différence entre vous et une fourmi, une araignée, un moustique ou une perdrixl ? Pourquoi VOTRE vie aurait-elle du sens sans que vous puissiez admettre que celles des autres êtres vivants en ont aussi.
Allons-y plus en profondeur
Supposons que vous n’en êtes pas à votre première vie vécue et sûrement pas la dernière. Supposons qu’avant votre naissance, avant que vous n’apparaissiez dans le ventre de votre mère, vous aviez déjà vécu une autre vie, autre part, avec un autre corps et un autre esprit. Et qu’à la fin de votre vie, au moment où votre corps et votre esprit vont mourir, et après ça, encore une autre,
Et encore une autre.
Le cycle infini de renaissance et de mort, le système qui englobe toutes les manières de renaître et toutes les vies qu’une personne peut avoir, se nomme Samsara.
(Maintenant que nous avons perdu la moitié de nos lecteurs, nous voudrions inviter l’autre moitié à poursuivre)
Il est important de comprendre que ce cycle de naissance et de mort n’est pas le même que celui de la réincarnation. La réincarnation implique que chaque individu possède une âme : une essence propre, un moi permanent, indissociable, qui va être transporté d’une vie à l’autre et qui restera toujours le même. La renaissance n’est pas la même chose : l’esprit et le corps meurent, et ce qui est transporté d’une vie à l’autre est le Karma, les qualités et les défauts d’une personne et une étincelle de conscience. Toutes ces choses sont transférées d’un corps et d’un esprit à un autre, de la même manière que la flamme d’une bougie presque consumée pourra être transférée à une nouvelle bougie. Ainsi, la cire et la mèche de la première bougie seront perdues, mais la flamme perdurera.
Pour ceux qui naissent dans nos sociétés occidentales (et qui sont pour la plupart chrétiens ou athées) le concept de Samsara doit sembler étrange, bizarre et même difficile à imaginer à première vue. En revanche, pour ceux qui naissent puis reçoivent cet enseignement dès leur plus jeune âge – ce qui est le cas dans l’ensemble des pays asiatiques et donc une part majoritaire de la population mondiale – cela fait partie de leur culture générale, c’est une vérité partagée, comprise et acceptée. Nous, les Occidentaux, qui sommes ignorants de cet enseignement et qui avons du mal à le concevoir, appartenons, de fait, à une minorité.
« Oui, tout ça, c’est très bien, c’est juste une croyance religieuse, et cela va à l’encontre de ce que nous dit la science. Comment pourriez-vous être sûr de quelque chose dont vous n’avez aucun souvenir ? »
Dans ce cas, laissez-moi vous poser cette question : à quand remontent vos premiers souvenirs, 3, 4 ans ? Peut-être juste quelques flashbacks un peu plus anciens ?
Et qu’en est-il d’avant ce moment-là ? D’où veniez-vous avant d’être né ? Vous ne vous souvenez pas, n’est-ce pas ?
Qui se souvient d’avoir été un fœtus dans le ventre de sa mère ?
Pourtant je “sais”, de la même façon que je sais tout le reste, qu’avant d’être né, j’étais un fœtus dans le ventre de ma mère.
Et comment sais-je que j’étais dans le ventre de ma mère avant ma naissance ?
Parce que tout le monde me le dit. Mes parents me l’ont dit, ils m’ont montré des photos de l’IRM du ventre de ma mère lorsqu’elle était enceinte. J’ai appris le processus de reproduction des humains à l’école. Tout ce que j’ai entendu provenant de mon entourage et l’acceptation générale véhiculée par ma société forment ce que j’appelle la connaissance – de quelque chose dont je n’ai aucun souvenir. Absolument aucun, mais je n’en doute pas une seconde.
Si je devais perdre la confiance que je porte dans une connaissance aussi basique, ce serait comme scier la branche sur laquelle je suis assis, et par la même occasion, défaire mon système de croyances envers ma société et tout ce qu’elle m’a appris.
Je ne vous demande pas de douter du fait que vous étiez à un moment un enfant dans le ventre de votre mère. J’essaye simplement de démontrer qu’il y a une partie de votre propre vie dont vous n’avez aucun souvenir. Et pourtant vous savez que ça a eu lieu.
Pourquoi ? Parce que beaucoup de gens vous l’ont dit.
Voyez-vous que ce que vous connaissez et comprenez de la vie provient de ce que vous avez entendu des autres – ce que vous avez appris à l’école, vu à la télévision – cette méthode d’apprentissage est normale et ce qu’elle contient est vrai. En fait,, c’est plutôt rare que notre mémoire, que notre expérience directe et personnelle, soit la source de notre connaissance.
Vous “savez” qu’avant votre naissance vous grandissiez dans le ventre de votre mère. Mais qu’en est-il d’avant ? Votre existence est-elle survenue du néant (vous êtes-vous mis à exister du jour au lendemain), ou venait-elle de quelque part ? Il existe cette autre partie de notre vie dont nous ignorons l’existence. Pourquoi ? Parce que personne ne nous en a parlé et que nous ne l’avons entendu nulle part.
Que vous soyez ouvert à cette idée ou non, le but de cet article n’est pas de vous convaincre, ni de vous faire accepter l’idée de Samsara, mais plutôt d’entrevoir les implications possibles d’une telle éventualité. Quelle est la signification d’être coincé dans une boucle infinie de vies ? Naître et mourir, naître et mourir, naître et mourir…
Explication du Samsara
Avant de naître, je ne venais pas de nulle part, mais bien de quelque part. J’ai vécu beaucoup d’autres vies dans le passé dont je ne me souviens plus.
J’ai déjà vécu d’autres naissances.
J’ai pleuré, j’ai recraché de la nourriture, j’ai appris à marcher, j’ai appris à parler, j’ai appris à lire, je suis allé à l’école, j’ai grandi, j’ai eu des sautes d’humeur durant ma puberté, j’ai souffert, je suis devenu vieux, fait des actes inutiles, des actes terribles, peut être quelques bonnes actions aussi, pensé que j’étais important, le centre de l’univers, j’ai apprécié manger, boire, séduire et jouir – j’ai ressenti le bonheur, la tristesse, la honte, j’ai cherché des réponses sans les trouver, un but, un sens, sans succès, je suis tombé malade, je suis devenu vieux, j’ai perdu la vue et l’ouïe, l’usage de mes deux jambes, les personnes que j’aimais sont mortes les unes après les autres, tout ce que j’avais construit s’est effondré brique par brique, j’ai eu des pères, des mères, des sœurs: tous morts – J’ai vécu une vie entière à essayer de m’aider moi-même, mais également les autres, à essayer de construire quelque chose, de faire quelque chose de bon – une maison, un jardin, une famille, un travail…
Pour finalement mourir inutilement et tout perdre, partir en fumée, ou être enterré sous terre. Même pas un soupçon de souvenir restant.
Et avant cela, une autre vie. Avant celle-là, une autre également. Et une autre, puis une autre. En remontant les dizaines de vies, centaines de vies, aux milliers de vies, aux millions et même MILLIARDS de vies que j’ai vécu.
Toutes plus inutiles les unes que les autres. Toutes sans aucun sens.
Et me voici un nouveau moi, à nouveau affairé à la même chose. Et la même chose va se produire durant cette vie. J’aurai une nouvelle vie dans laquelle je ne me souviens pas de celle-ci et une autre après celle-là.
Mais pourquoi donc un système aussi ridicule? Quel est ce monde en forme de piège et qui tourne en boucle, encore et encore, qui ne me laisse pas la possibilité de grandir, de progresser, perpétuellement à la recherche de ce que l’on aime, toujours à fuir ce que l’on hait, comme le personnage de Mario dans le jeu vidéo qui court inlassablement après la princesse ?
Si Mario pouvait voir sa situation telle qu’elle est, se réveiller et réaliser le jeu sans fin dans lequel il joue – que ferait-il ? Voudrait-il continuer ?
Notre situation n’est pas meilleure que la sienne, mais parce que nous sommes tellement ignorants à propos de la réalité et tellement attachés aux petits plaisirs que nous avons ; tellement amoureux de notre zone de confort, nous ne pouvons nous résoudre à voir autre chose, et nous ne réalisons pas comment nos attachements à nos plaisirs nous enchaînent à notre souffrance. Nous pensons que nos vies valent la peine, nous pensons que nous nous en tirons plutôt bien, mais c’est de l’aveuglement, nos yeux sont fermés à la réalité des choses. Nous ne savons pas à quel point nous souffrons.
Nous sommes comme des poulets d’élevage industriel – ceux qui naissent en usine, élevés en batterie et qui vivent leur vie dans une petite cage : leur vie n’ayant pour but que d’être tués un jour afin que leur viande soit emballée sous plastique, puis vendue à un prix dérisoire en supermarché. On peut difficilement imaginer un destin plus triste que de naître comme l’un de ces poulets d’usine. C’est difficile de penser à une manière plus pitoyable de vivre sa vie.
Et pourtant – un poulet d’usine qui a vécu toute sa vie dans cette petite cage ne sait pas à quel point il souffre. Ses yeux sont fermés à la possibilité de quoi que ce soit d’autre, n’importe quoi qui pourrait exister en dehors de sa petite cage est inimaginable.
L’une des raisons de son aveuglement est qu’il n’a jamais connu quelque chose d’autre. Mais la raison principale est qu’il possède une source de plaisir, quelque chose d’agréable pour lui : il aime la nourriture qu’on lui donne chaque jour.
C’est bon, c’est goûteux.
Son esprit est fixé sur la source du plaisir, sur sa propre avidité envers cette nourriture. Même s’il mange le même grain chaque jour, il en voudra toujours plus le jour suivant ; car c’est toujours bon, encore goûteux. Il est dans l’ignorance la plus totale, il ignore que si ce grain lui est donné, par la main d’un ennemi, ce grain qui représente la source principale de son plaisir, c’est uniquement dans le but de le rendre gras pour ensuite le tuer.
S’il parvenait à voir ça, à comprendre cela, sûrement qu’il renoncerait à son « plaisir » : il se détournerait avec dégoût du blé et du maïs qui lui sont donnés, il fermerait son bec, commencerait une grève de la faim et planifierait un moyen de s’échapper. Mais parce qu’il ne voit pas tout ça, c’est presque impossible qu’il abandonne sa seule source de plaisir et de joie dans sa vie. Pourquoi ferait-il une telle chose ?
L’enseignement du Bouddha décrit notre situation comme étant similaire à celle de ces poulets d’élevage, toujours en train de souffrir, coincé dans un cycle infini de naître et mourir, naître et mourir. Et pourtant nous ne le voyons pas, et tant que nous ne le voyons pas, ce ne sera pas aisé de renoncer aux choses que nous appelons plaisir et bonheur.
Parce que notre situation, telle qu’elle est vraiment, est si difficile à voir, peu de gens décident de faire du but de leur vie la sortie de ce système ; peu de gens sont capables de renoncer totalement à leur zone de confort, leurs sources de plaisir, ce qu’ils connaissent du bonheur. Essayer d’expliquer le fonctionnement général de ce système à quelqu’un qui ne le voit pas revient à expliquer à un poulet d’élevage qu’il se trouve dans une cage et que la nourriture qu’il aime lui est juste donnée afin de le préparer pour l’abattoir.
Voir la réalité de la valeur de la vie
Comme point de départ pour comprendre la réalité de notre propre condition je pourrais tenter de simplement observer à l’intérieur de moi-même, ainsi que le monde tel qu’il est réellement, non pas de la manière que je l’imagine ou ce que j’en ai entendu dire et ce que j’en ai appris, mais tel que je le vois.
Quelle est cette chose que j’appelle bonheur ? De quoi est faite la joie ? Quel est le meilleur moment que je puisse imaginer, quel est le meilleur moment que j’ai jamais vécu ? Qu’est-ce qui rend la vie bonne ?
Pensez-y – Le meilleur parmi tous les meilleurs moments. Il n’y a rien au-dessus et il n’y aura jamais mieux. C’est l’apothéose de votre vie.
Et ce n’est pas assez.
Ce n’est pas assez, car nous ne nous en contenterons pas. Nous continuerons à aller de l’avant et à chercher pour plus.
Le désir de plus de plaisir par tous les moyens possibles et inimaginables – de belles vues, de la belle musique, de la nourriture merveilleuse, des senteurs incroyables et des sensations agréables sur le corps – nous ne pouvons pas être saturés par ces choses, jamais complètement, jamais totalement.
Quelle que soit la quantité de bonnes choses que nous mangeons, ce n’est jamais assez. Quelque soit la quantité de relations sexuelles que nous avons, ce n’est jamais assez. Quelque soit le nombre d’heures que nous passons à écouter de la musique ou des blagues qui nous font rire, nous voulons toujours en entendre plus, encore plus.
Donc quelle est-elle, cette meilleure chose à propos de notre existence, cette chose pour laquelle nous vivons mais qui ne dure jamais, qui n’est jamais assez ?
Chaque saveur délicieuse dans la bouche finit par disparaître, seconde après seconde – chaque plat finit par pourrir, chaque moment de joie se transformera en regret, toutes les sortes de beauté cachent une laideur en elle, il suffit pour cela de leur laisser suffisamment de temps pour se dévoiler.
Même ce corps qui est mien, que je considère comme Moi, que je considère comme Moi-même – ce corps s’effrite, les cheveux deviennent gris, toutes les cellules meurent progressivement. Il est impermanent, il change chaque seconde, il se dégrade un peu plus chaque instant.
Il se fatigue de plus en plus, tous les jours il devient de moins en moins performant – il possède une date d’obsolescence, comme ces produits fabriqués en Chine. À chaque battement, c’est un en moins qu’il lui reste à battre avant de s’arrêter.
J’aime tellement ce corps, j’en prends soin, je l’embellit, je veux que les gens me disent qu’il est beau, je me comporte comme s’il allait durer pour toujours, comme si je lui faisais confiance – qu’importe l’intensité avec laquelle je me raccroche à tout ça – la beauté, la jeunesse, la santé, la vie – tout ceci va, sans exception, être repris, puis détruit, et je n’ai aucun contrôle là-dessus.
Donc, quelle est cette chose dont je dépends ? Que m’apporte-t-elle de bon ?
Pourquoi mon existence tourne autour de ça ? A nouveau, où est-ce que je place la valeur de mon existence ? Où est le sens de tout ça ? Quel est le but ?
Et si je ne trouve pas de valeur à cette chose telle qu’elle est, comment puis-je lui en donner, comment voudrais-je pouvoir lui en donner ?
« Moines, » le Bouddha dit une fois, « Quand vous êtes perdus dans le noir, ne cherchez vous pas la lumière ? »
Mais si nous avons vécu toutes nos vies dans le noir, nous ne savons pas ce qu’est l’obscurité, ni même ce qu’est la lumière. Nous devons commencer en plaçant notre confiance en quelqu’un qui l’a vu par et pour lui même, ensuite seulement nous pourrons le voir par et pour nous-mêmes, et de là nous nous mettrons en route vers le chemin de la sortie.